pololasi · @pololasi
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Ô courbes, méandre,
Secrets du menteur,
Est-il art plus tendre
Que cette lenteur ?

Je sais où je vais,
Je t’y veux conduire,
Mon dessein mauvais
N’est pas de te nuire...

Quoique souriante
En pleine fierté,
Tant de liberté
Te désoriente ?

Ô Courbes, méandres,
Secrets du menteur,
Je veux faire attendre
Le mot le plus tendre.

Paul Valery - L'insinuant

#PaulValery #poetry #poesie

Last updated 1 year ago

Thor · @thor
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Le Sylphe

Ni vu ni connu
Je suis le parfum
Vivant et défunt
Dans le vent venu !

Ni vu ni connu
Hasard ou génie ?
À peine venu
La tâche est finie !

Ni lu ni compris ?
Aux meilleurs esprits
Que d’erreurs promises !

Ni vu ni connu,
Le temps d’un sein nu
Entre deux chemises !

Paul Valéry

#Poesie #Sonnet #PaulValery

Last updated 2 years ago

pololasi · @pololasi
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La confusion morose
Qui me servait de sommeil,
Se dissipe dès la rose
Apparence du soleil.
Dans mon âme je m’avance,
Tout ailé de confiance :
C’est la première oraison !
À peine sorti des sables,
Je fais des pas admirables
Dans les pas de ma raison.
 
Salut ! encore endormies
À vos sourires jumeaux,
Similitudes amies
Qui brillez parmi les mots !
Au vacarme des abeilles
Je vous aurai par corbeilles,
Et sur l’échelon tremblant
De mon échelle dorée,
Ma prudence évaporée
Déjà pose son pied blanc.
 
Quelle aurore sur ces croupes
Qui commencent de frémir !
Déjà s’étirent par groupes
Telles qui semblaient dormir :
L’une brille, l’autre bâille ;
Et sur un peigne d’écaille
Égarant ses vagues doigts,
Du songe encore prochaine,
La paresseuse l’enchaîne
Aux prémisses de sa voix.
 
Quoi ! c’est vous, mal déridées !
Que fîtes-vous, cette nuit,
Maîtresses de l’âme, Idées,
Courtisanes par ennui ?
— Toujours sages, disent-elles,
Nos présences immortelles
Jamais n’ont trahi ton toit !
Nous étions non éloignées,
Mais secrètes araignées
Dans les ténèbres de toi !
 
Ne seras-tu pas de joie
Ivre ! à voir de l’ombre issus
Cent mille soleils de soie
Sur tes énigmes tissus ?
Regarde ce que nous fîmes :
Nous avons sur tes abîmes
Tendu nos fils primitifs,
Et pris la nature nue
Dans une trame ténue
De tremblants préparatifs...
 
Leur toile spirituelle,
Je la brise, et vais cherchant
Dans ma forêt sensuelle
Les oracles de mon chant.
Être ! Universelle oreille !
Toute l’âme s’appareille
À l’extrême du désir...
Elle s’écoute qui tremble
Et parfois ma lèvre semble
Son frémissement saisir.
 
Voici mes vignes ombreuses,
Les berceaux de mes hasards !
Les images sont nombreuses
À l’égal de mes regards...
Toute feuille me présente
Une source complaisante
Où je bois ce frêle bruit...
Tout m’est pulpe, tout amande,
Tout calice me demande
Que j’attende pour son fruit.
 
Je ne crains pas les épines !
L’éveil est bon, même dur !
Ces idéales rapines
Ne veulent pas qu’on soit sûr :
Il n’est pour ravir un monde
De blessure si profonde
Qui ne soit au ravisseur
Une féconde blessure,
Et son propre sang l’assure
D’être le vrai possesseur.
 
J’approche la transparence
De l’invisible bassin
Où nage mon Espérance
Que l’eau porte par le sein.
Son col coupe le temps vague
Et soulève cette vague
Que fait un col sans pareil...
Elle sent sous l’onde unie
La profondeur infinie,
Et frémit depuis l’orteil.

Paul Valéry - Aurore

#PaulValery #poetry #poesie

Last updated 2 years ago

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pololasi · @pololasi
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Anne qui se mélange au drap pâle et délaisse
Des cheveux endormis sur ses yeux mal ouverts
Mire ses bras lointains tournés avec mollesse
Sur la peau sans couleur du ventre découvert.

Elle vide, elle enfle d'ombre sa gorge lente,
Et comme un souvenir pressant ses propres chairs,
Une bouche brisée et pleine d'eau brûlante
Roule le goût immense et le reflet des mers.

Enfin désemparée et libre d'être fraîche,
La dormeuse déserte aux touffes de couleur
Flotte sur son lit blême, et d'une lèvre sèche,
Tête dans la ténebre un souffle amer de fleur.

Et sur le linge où l'aube insensible se plisse,
Tombe, d'un bras de glace effleuré de carmin,
Toute une main défaite et perdant le délice
A travers ses doigts nus dénoués de l'humain.

Au hasard ! A jamais, dans le sommeil sans hommes
Pur des tristes éclairs de leurs embrassements,
Elle laisse rouler les grappes et les pommes
Puissantes, qui pendaient aux treilles d'ossements,

Qui riaient, dans leur ambre appelant les vendanges,
Et dont le nombre d'or de riches mouvements
Invoquait la vigueur et les gestes étranges
Que pour tuer l'amour inventent les amants...

Paul Valery - Anne

#PaulValery #poetry #poesie

Last updated 2 years ago

pololasi · @pololasi
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Un jour mourant, mêlé de tonnerre et d’alerte,
Un Saule, tout tremblant de pluie, en robe verte,
Deux coqs, le blanc piteux, l’autre noir et vainqueur,
Et nous, tout attendris de nous faire un seul cœur
En qui la même amour s’aime, abonde et s’épanche,
Chère, cela compose un assez beau dimanche ;
Où ne manqua ce fruit de notre accord étroit :
La préparation sage des « Cours de Droit ».

Paul Valery - Le beau dimanche

#PaulValery #poetry #poesie

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pololasi · @pololasi
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Un fruit de chair se baigne en quelque jeune vasque,
(Azur dans les jardins tremblants) mais hors de l’eau,
Isolant la torsade aux puissances de casque,
Luit le chef d’or que tranche à la nuque un tombeau.

Éclose la beauté par la rose et l’épingle !
Du miroir même issue où trempent ses bijoux,
Bizarres feux brisés dont le bouquet dur cingle
L’oreille abandonnée aux mots nus des flots doux.

Un bras vague inondé dans le néant limpide
Pour une ombre de fleur à cueillir vainement
S’effile, ondule, dort par le délice vide,

Si l’autre, courbé pur sous le beau firmament,
Parmi la chevelure immense qu’il humecte,
Capture dans l’or simple un vol ivre d’insecte.

Paul Valery - Baignée in Album de vers ancien

#PaulValery #poetry #poesie

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pololasi · @pololasi
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Un poème long aujourd'hui et l''un de mes préférés. Il me semble ne pas être le seul à aimer d'ailleurs n'est ce pas @Septie ?

Paul Valery Le cimetière marin

Ce toit tranquille, où marchent des colombes,
entre les pins palpite, entre les tombes;
midi le juste y compose de feux
la mer, la mer, toujours recommencée!
O récompense après une pensée
qu'un long regard sur le calme des dieux!

Quel pur travail de fins éclairs consume
maint diamant d'imperceptible écume,
et quelle paix semble se concevoir!
Quand sur l'abîme un soleil se repose,
ouvrages purs d'une éternelle cause,
le temps scintille et le songe est savoir.

Stable trésor, temple simple à Minerve,
masse de calme et visible réserve,
eau sourcilleuse, Œil qui garde en toi
tant de sommeil sous un voile de flamme,
O mon silence!... Édifice dans l'âme,
mais comble d'or aux mille tuiles, Toit!

Temple du temps, qu'un seul soupir résume,
a ce point pur je monte et m'accoutume,
tout entouré de mon regard marin;
et comme aux dieux mon offrande suprême,
la scintillation sereine sème
sur l'altitude un dédain souverain.

Comme le fruit se fond en jouissance,
comme en délice il change son absence
dans une bouche ou sa forme se meurt,
je hume ici ma future fumée,
et le ciel chante à l'âme consumée
le changement des rives en rumeurs.

Beau ciel, vrai ciel, regarde-moi qui change!
Après tant d'orgueil, après tant d'étrange
oisiveté, mais pleine de pouvoir,
je m'abandonne à ce brillant espace,
sur les maisons des morts mon ombre passe
qui m'apprivoise à son frêle mouvoir.

L'âme exposée aux torches du solstice,
je te soutiens, admirable justice
de la lumière aux armes sans pitié!
Je te rends pure à ta place première:
Regarde-toi!... Mais rendre la lumière
suppose d'ombre une morne moitié.

O pour moi seul, à moi seul, en moi-même,
auprès d'un cœur, aux sources du poème,
entre le vide et l'événement pur,
j'attends l'écho de ma grandeur interne,
amère, sombre et sonore citerne,
sonnant dans l'âme un creux toujours futur!

Sais-tu, fausse captive des feuillages,
golfe mangeur de ses maigres rivages,
sur mes yeux clos, secrets éblouissants,
quel corps me traîne a sa fin paresseuse,
quel front l'attire à cette terre osseuse?
Une étincelle y pense à mes absents.

Ferme, sacré, plein d'un feu sans matière,
fragment terrestre offert à la lumière,
ce lieu me plaît, dominé de flambeaux,
composé d'or, de pierres et d'arbres sombres,
où tant de marbre est tremblant sur tant d'ombre;
la mer fidèle y dort sur mes tombeaux!

Chienne splendide, écarte l'idolâtre!
Quand solitaire au sourire de pâtre,
je pais longtemps, moutons mystérieux,
le blanc troupeau de mes tranquilles tombes,
éloignes-en les prudentes colombes,
Les songes vains, les anges curieux!

Ici venu, l'avenir est paresse.
L'insecte net gratte la sécheresse;
tout est brûlé, reçu dans l'air
a je ne sais quelle sévère essence...
La vie est vaste, étant ivre d'absence,
et l'amertume est douce, et l'esprit clair

Les morts cachés sont bien dans cette terre
qui les réchauffe et sèche leurs mystères.
Midi là-haut, midi sans mouvement,
en soi se pense et convient à soi-même...
Tête complète et parfait diadème,
je suis en toi le secret changement.

Tu n'as que moi pour contenir tes craintes!
Mes repentirs, mes doutes, mes contraintes
sont le défaut de ton grand diamant...
Mais dans leur nuit toute lourde de marbres,
un peuple vague aux racines des arbres
a pris déjà ton parti lentement.

Ils ont fondu dans une absence épaisse,
l'argile rouge a bu la blanche espèce,
le don de vivre a passé dans les fleurs!
Ou sont des morts les phrases familières,
l'art personnel, les âmes singulières?
la larve file où se formaient des pleurs.

Les cris aigus des filles chatouillées,
les yeux, les dents, les paupières mouillées,
le sein charmant qui joue avec le feu,
le sang qui brille aux lèvres qui se rendent,
les derniers dons, les doigts qui les défendent,
tout va sous terre et rentre dans le jeu!

Et vous, grande âme, espérez-vous un songe
qui n'aura plus ces couleurs de mensonge
qu'aux yeux de chair l'onde et l'or font ici ?
Chanterez-vous quand serez vaporeuse ?
Allez! Tout fuit! Ma présence est poreuse,
la sainte impatience meurt aussi!

Maigre immortalité noire et dorée,
consolatrice affreusement laurée,
qui de la mort fais un sein maternel,
le beau mensonge et la pieuse ruse!
Qui ne connaît, et qui ne les refuse,
le crâne vide, et ce rire éternel!

Meres profonds, têtes inhabitées,
qui sous le poids de tant de pelletées,
étés la terre et confondez nos pas,
le vrai rongeur, le ver irréfutable,
n'est point pour vous qui dormez sous la table,
il vit de vie, il ne me quitte pas!

Amour, peut-être, ou de moi-même haine?
La dent secrète est de moi si prochaine,
que tous les noms lui peuvent convenir!
Qu'importe, il voit, il veut, il sent, il touche!
Ma chair lui plaît et jusques sur ma couche,
a ce vivant je vis d'appartenir!

Zénon! Cruel Zénon! Zénon d'Élée!
M'as-tu percé de cette flèche ailée
qui vibre, vole et ne vole pas!
Le son m'enfante et la flèche me tue!
Ah le soleil... Quelle ombre de tortue
pour l'âme, Achille, immobile à grands pas!

Non, Non!... Debout! Dans l'ère successive!
Brisez, mon corps, cette forme pensive!
Buvez, mon sein, la naissance du vent!
Une fraîcheur, de la mer exhalée,
me rend mon âme... O puissance salée!
Courons à l'onde en rejaillir vivant!

Oui! grande mer de délires douée,
peau de panthère et chlamyde trouée,
de mille et mille idoles du soleil,
hydre absolue, ivre de ta chair bleue,
qui te remords l'étincelante queue
dans un tumulte au silence pareil,

Le vent se lève!... il faut tenter de vivre!
L'air immense ouvre et referme mon livre,
la vague en poudre ose jaillir des rocs!
Envolez-vous, pages tout éblouies!
Rompez, vagues! Rompez d'eaux réjouies
le toit tranquille où picoraient des focs

Il y a dans ses 24 strophes à la forme soignée énormément de choses qui me touchent.
Notamment le premier vers de la dernière strophe
Le vent se lève!... il faut tenter de vivre!
J'y vois un appel a tenter de vivre fort et intensément et le verbe tenter à beaucoup d'importance. L'important c'est de tenter. Le vent emporte tout, alors pourquoi pas en faire un élan, de ce vent qui métaphoriquement, est intérieur.

De plus ce vers a inspiré en partie deux œuvres importantes aussi pour moi et pour d'autres.

Un des plus beaux et des plus oniriques des ghibli
fr.wikipedia.org/wiki/Le_vent_

Et de façon parallèle puisque le ghibli en est en partie inspiré. Le court roman d'amour triste et romantique de Tatsuo Hori, qui raconte une histoire d'amour brève entre le narrateur et sa femme tuberculeuse, au sanatorium.
fr.wikipedia.org/wiki/Le_vent_

Il y a parfois une délicatesse et une forme chez les créateurs japonais qui est du même monde que Paul Valery. J'aime beaucoup ce monde ou rien ne pèse et qui touche pourtant fondamentalement a des choses très lourdes.

#hayaomiyazaki #ghibli #TatsuoHori #LeCimetièreMarin #poesie #PaulValery

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